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JOY, l'envol du papillon


Un air de jazz emplit la pièce d’une blancheur nacrée. Au bureau, une jeune femme menue, concentrée, fait courir sur une feuille de papier des traits rapides et fins.


En s’approchant, on reconnaît l’esquisse d’un bijou, un bracelet dont les lignes enlacent finement quelques perles rondes dans leur écrin d’or blanc. Rencontre avec Titaua Kinnander-Mollard, créatrice et gérante du show-room Joy, qui a ouvert ses portes à Papeete fin 2017.



Fin des années 1990. Titaua a 18 ans et la vie devant elle. Des études de gestion en cours. Un avenir tracé, sans doute dans une des sociétés du Territoire. Et quelques mois d’été à occuper, pour se faire quelques francs. Par un ami proche, elle rencontre Philippe Chenne, neveu de Robert Wan et négociant en perles, qui lui propose un job d’été. Titaua est ravie. Elle aime les perles, les bijoux, depuis toujours. Or, les années 1990, dans le monde de la perle de Tahiti, c’était l’eldorado. La production bat son plein, des milliers de perles sont à trier. Ce sera son premier contact avec cette gemme exceptionnelle.


Les perles arrivent des fermes de Marutea, appartenant à Robert Wan. Titaua se sou- vient :

« Quand les perles arrivaient et étaient répandues sur les tables de tri, la pièce en était illuminée, c’était incroyable ».

Formes, qualité, lustre, elle apprend avec les trieuses professionnelles de Philippe. L’expérience est concluante, elle aime ce métier et, quand Philippe lui propose d’être embauchée, fin 1998, elle n’hésite pas longtemps, même si, résidant à Moorea, elle fait la navette en ferry tous les jours.

Du tri aux salons internationaux

Parfaitement bilingue, Titaua se retrouve dans l’espace commercial, où elle s’occupe des clients internationaux. Elle croise aussi pas mal de bijoutiers de la place. C’est à l’une de ces occasions qu’elle rencontre Marc et Tahia Collins, bijoutiers réputés. En 1999, ils lui proposent de l’embaucher, avec l’accord de Philippe. Leur boutique de Moorea a besoin d’une bonne vendeuse. L’occasion est trop belle de retrouver son île et d’aider sa maman.


Avec Tahia, elle perfectionne non seulement le contact clients, mais elle apprend aussi le perçage des perles, le collage, le montage des apprêts.


En 2000, nouveau changement et retour sur Papeete, où Rémi Boucher et son épouse Laurence embauchent Titaua pour leur show room du Quartier du commerce. Cette expé- rience fut parmi les plus marquantes pour Titaua. Rémi et Laurence possèdent une ferme perlière et deux bou- tiques, dont un bar à perles flottant ! Laurence participe à des salons internationaux, Rémi développe la com- mercialisation de perles sur la Nouvelle-Zélande, c’est une autre dimension pour Titaua. Surtout, elle rencontre là Jeanne Lecourt, une formatrice hors-pair. Durant ces années, elle apprend le monde de la ferme perlière, la nacre, sa découpe, l’élevage des huîtres perlières

greffées... Tout semble parfait dans sa jeune carrière.



Wan et Vaima Perles

Mais la vie a ses embûches que personne ne prévoit. Titaua perd sa maman, tandis que la boutique où elle travaille fait faillite. Elle a désormais sa petite sœur à charge, il lui faut retrouver un travail, vite. Ce sera quelques mois dans une petite boutique d’accessoires et de bijoux fantaisie, qui commence à se développer. C’est aussi une bonne école.

La vie est aussi faite de rencontres fortuites. Un jour de 2002, elle croise l’égérie de Robert Wan, Turia. Cette dernière l’invite à postuler, car Wan recrute. Or, Titaua a un profil intéressant et elle est retenue. Les contacts avec les clients internationaux, la gestion de la boutique du Sheraton, le concept Robert Wan : l’expérience sera inoubliable.


12 années chez Vaima Perles

La vie est faite de clins d’œil aussi. Quand Titaua avait une quinzaine d’année, elle était en admiration devant la boutique de M. Henri Garaccione, Vaima Perles, repris par sa fille Sophie. En 2004, elle est approchée par une des vendeuses. Le challenge est à relever. Elle y restera douze années, parmi les plus marquantes de sa carrière. Sophie lui fait très vite confiance. Là, Titaua développe ses compétences, dessine, crée. Sophie lui confie bientôt la création d’une ligne complète de bijoux, or et perles, qui porte son nom, Titaua.


Suivront « Larmes » (2010) et enfin Joy (2015), trois collections complètes qui allient élégance, fraîcheur, finesse ; une approche contemporaine aussi, qui permet à toutes les femmes de porter ces bijoux en maintes oc- casions. Le succès est réel. Mais en 2015, Sophie décide de vendre. Les nouveaux actionnaires développent leur stratégie, qui ne lui correspond pas. Fin 2016, elle préfère quitter Vaima Perles.



2017, L’aventure JOY commence

Frédéric Mollard, grossiste en perles, son compagnon depuis 2013, connaît le potentiel de Titaua. Alors qu’elle est en Nouvelle-Zélande pour se changer les idées, il lui apprend qu’il a réservé pour elle un local et qu’il est temps de se lancer. Titaua relève le défi. Elle aménage le local tout en créant sa première ligne.

Le 1er septembre 2017, Joy ouvre ses portes. Le show room sera inauguré le 5 octobre suivant. Les vitrines, éclairées avec justesse, présentent des créations d’une rare beauté. Tout est fin, élégant, original et noble, aisément portable, réalisé avec perfectionnisme. S’il y a tant de talent dans les créations de Titaua, rien n’est venu du hasard : tout est le fruit d’une histoire née il y a vingt ans. 20 années d’apprentissage, de rencontres, de formation. Le résultat est là. La perle de Tahiti est entre de bonnes mains.

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